Vernissages
Vernis-sage : Le critique d’art que fut Guillaume Apollinaire pendant ses années de jeunesse collabora, entre 1910 et 1914, avec le journal L’Intransigeant, dans la rubrique La vie artistique, où il évoque fréquemment le Salon et… ses vernissages.
Ah, ces vernissages si « brillants » (le mot revient souvent) où se pressaient « belles dames, beaux messieurs, académiciens, généraux, peintres, modèles, bourgeois, gens de lettres et bas-bleus » où « malgré l’incertitude du temps, il y avait beaucoup de toilettes claires » où « on se montrait les originaux des portraits et l’on papotait, l’on papotait… » (1)
Les circonstances empêchent pour un temps encore la tenue de vernissages, et ce sont les inaugurations, lancements et autres (ré)ouvertures qui foisonnent, dans le respect des contraintes sanitaires. Le vernissage se serait-il dépouillé de son sens mondain se rapprochant de son sens originel ? Terme né au Salon, il évoquait la toute dernière pose d’une couche de vernis, sur place, le matin même de l’inauguration. Il a désigné ensuite la réception, la veille de l’ouverture d’une exposition, qui accueillait des autorités, des critiques d’art et autres personnalités, et sa version publique le lendemain. Apollinaire en témoigne :
« Vernissage… mot complètement détourné de son sens, les peintres ne vernissent plus, ou du moins vernissent avant ou ailleurs. Hier, c’était le vernissage des marchands de tableaux qui venaient faire les achats. On vit aussi M. Dujardin-Beaumetz qui achète pour le compte de l’État. Il n’a pas encore fixé son choix et reviendra un de ces jours. Aujourd’hui, ce fut le vernissage du public. La foule s’écrasait dans les baraquements du Cours-la-Reine … l’inondation humaine après l’inondation fluviale dont le sol est encore humide ! Il y a de cela un mois à peine, la Seine montait jusque-là… » (2).
En attendant le retour d’une telle foule et du caractère festif de ces événements, les Galeries ont rouvert, accueillent, exposent et … vernissent sagement !
Clara Pagnussatt