Souffles de nature morte
« Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches,
Et puis voici mon cœur qui ne bat que pour vous.
Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches
Et qu’à vos yeux si beaux l’humble présent soit doux. » [1]
Par l’objet représenté, la nature morte signifie le temps. Elle saisit une forme dans un instant de sa vie et de sa relation avec d’autres éléments. Hors de toute narration, l’objet est là, sous nos yeux. Il s’offre.
Composition au sein d’une fresque antique, nature morte d’inspiration janséniste du XVIIe siècle, objets inanimés devenus sujets sous l’œil de Chardin, ou encore matière de recherche des avant-gardes, la nature morte dépasse ses contours. Elle est à la fois lieu de création et point de départ. La liberté du choix des objets et de ses assemblages permet aux plasticiens d’étudier l’espace, la couleur et la forme. De donner des solutions à des problématiques picturales, mais aussi à certains questionnements intérieurs.
La nature morte perdure. A la fois terreau et terrain d’exploration pour les créateurs d’aujourd’hui, elle est présente et hors du temps. La souplesse qu’elle propose continue d’interroger le regard. A travers l’objet, sa matérialité et son éternité, nous offre-t-elle un souffle de contemplation : celui de nous-même?
Mahault de Raymond-Cahuzac
[1] Paul Verlaine, « Green » in Romances sans paroles (1874).
Oeuvre : Damien Cabanes, Galerie Eric Dupont © photo : Clara Pagnussatt